Youth Makes Art Makes Cities - Un projet participatif et créatif

Des jeunes adolescent·es entre 12 et 15 ans de Lausanne et de Cheseaux-sur-Lausanne ont exploré leurs préaux scolaires en tant qu'espaces publics pour y créer des projets d'appropriation artistiques.

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L’espace public est espace fédérateur, lieu de culture, de vivre ensemble et d’expression, c’est un lieu d’apprentissage qui constitue un condensé des problématiques d’une société: enjeux climatiques ou encore questions d’inclusivité.

La place des adolescents en milieu urbain est souvent négligée. Pourtant c’est un âge charnière pendant lequel l’appropriation des espaces publics est particulière car elle offre aux jeunes plus d’autonomie, elle répond à un besoin de sociabilisation, à leur pouvoir d’achat très limité, elle leur permet de pratiquer une activité physique et de se rencontrer. Dans ce contexte le préau, en tant qu’espace scolaire fréquenté quotidiennement et public en dehors des heures d’école, pourrait accueillir les adolescent·es et répondre à leurs besoins.

En impliquant directement les élèves, le projet a encouragé l’appropriation des préaux à travers des interventions créatives. Il invitait les jeunes à explorer le potentiel des préaux en tant qu’espaces publics privilégiés et adaptés à leurs pratiques. Par le biais des arts vivants, ces lieux sont devienus des terrains d’expérimentation, offrant aux élèves l’opportunité de redéfinir le rôle et la qualité des préaux. Le projet visait ainsi à transformer ces espaces en des lieux d’expression artistique et de découverte.

Une méthode participative fondée sur l’expérimentation artistique

Ce projet a été réalisé en collaboration avec le projet de recherche «Public schoolyards» développé par le Laboratoire de Sociologie Urbaine (LaSUR) de l’EPFL et pilotée par Sonia Curnier. Celle-ci s’inscrit dans l’actualité de la nouvelle politique des préaux scolaires menée par la Ville de Lausanne depuis 2021 et dans le prolongement de l’édition « les préaux, un espace public à priorité enfants » du projet Pousses Urbaines de la délégation à l’enfance de la Ville de Lausanne (dont fait partie Ville en tête) qui déjà les enjeux relatifs à la mutualisation, préconisant de qualifier ces lieux d’« espaces publics à priorité enfants ». Le projet de recherche visait donc à apporter des observations concrètes et des pistes de conceptions spatiales pour nourrir les réflexions menées par la ville autour des établissements primaires et secondaires (EPS), destinés des élèves âgés de 10 à 15 ans.

Sur la base de ces résultats, Ville en tête a ensuite initié le projet « Youth Makes Art Makes Cities » construit autour d’une méthode participative mêlant exploration spatiale, expression artistique et co-création. Développée par par l'équipe de l'association en collaboration avec les artistes Laura Gaillard (danse, performance) et Audrey Bersier (création sonore et visuelle), l'approche consistait à faire émerger, à travers des ateliers, les perceptions, ressentis et aspirations des jeunes vis-à-vis de leurs préaux scolaires envisagés comme des espaces publics. La méthode a été déployée sous forme de six séquences : une introduction à la notion d’espace public, une exploration physique et sensorielle du préau, puis trois ateliers de création artistique accompagnés d’exercices corporels, d’enregistrements sonores, de productions vidéos ou de performances. Les jeunes étaient invités à s’exprimer librement sur leur environnement à travers des formes sensibles et variées, seuls ou en petits groupes. Cette pédagogie, volontairement non directive, a permis à chacun·e de trouver sa place dans le processus, en favorisant l’autonomie, la collaboration et l’expérimentation.

La restitution finale, la sixième séquence, pensée avec les élèves, a pris la forme de présentations collectives ou de films projetés en classe, dans un cadre choisi par les participant·es pour préserver une ambiance de confiance. Ces restitutions ont joué un rôle essentiel, à la fois comme aboutissement artistique, moment de valorisation, et base pour donner aux élèves les outils pour aller présenter leurs projets aux acteurices décisionnels de l'aménagement de leurs préaux.

Des projets participatifs, artistiques et collectifs pour s’approprier un espace hostile

Les ateliers ont permis de révéler un rapport ambivalent des jeunes à leurs préaux : peu accueillants, jugés vétustes et fortement associés à l’école, ils ne sont presque jamais investis en dehors du temps scolaire. Pourtant, ces espaces recèlent un potentiel important d’appropriation, notamment à travers le sport, les rencontres et les pratiques artistiques. À Cheseaux-sur-Lausanne, les élèves ont exprimé de nombreuses propositions d’aménagement (mobiliers, équipements, végétalisation), traduites dans une performance collective filmée mêlant chorégraphie, vidéos et sons. À Grand-Vennes, malgré un contexte plus difficile et une dynamique de groupe complexe, des productions individuelles ont vu le jour, allant de la création de flyers et d’affiches à la fabrication de mobilier et de vidéos en stop-motion.

Le bilan du projet souligne ainsi que, si l’implication des jeunes demande du temps, de la confiance et un accompagnement adapté, l'approche artistique s’est révélé un puissant levier d’expression et de transformation. La démarche artistique, ancrée dans le vécu des élèves, a permis de dépasser les freins initiaux et de construire une relation sensible et critique à l’espace scolaire. Ces projets, parfois transmis aux autorités locales, nourrissent désormais les réflexions en cours sur le réaménagement des préaux, tout en laissant une trace concrète de l’engagement des jeunes.